Au mois de septembre 1945, à Douala, les forces de l’ordre ont tiré sur les cheminots, utilisant, pour la première fois, le droit de grève introduit dans les colonies françaises depuis le mois d’août 1944.
Au mois de mai 1955, à Yaoundé, à Douala, à Mbanga, à Nkongsamba, les forces de l’ordre ont tiré sur la population qui exigeait la réunification et l’indépendance du Cameroun, la levée de la tutelle des Nations Unies, autrement dit, la proclamation de l’indépendance.
Au mois de décembre 1974, les forces de l’ordre ont tiré sur les étudiants de l’université de Yaoundé qui réclamaient de meilleures conditions d’études.
Tout au long de l’année 1991, dans plusieurs villes camerounaises, les forces de l’ordre ont tiré sur les manifestants qui réclamaient la tenue d’une conférence nationale souveraine au Cameroun.
Du 25 au 29 février 2008, les forces de l’ordre ont tiré sur les manifestants opposés au projet du président de la République de mettre fin à la limitation des mandats présidentiels et à la vie chère.
A toutes ces occasions, et bien d’autres, le bilan des pertes en vies humaines a été lourd. C’est ainsi que, pour les émeutes de février 2008, le gouvernement reconnaît le chiffre de quarante (40) Came-rounais tués, tandis que les organisations des droits de l’homme, pour leur part, publient le chiffre de 140 morts.
CECI EST AINSI DEVENU UNE TRADITION AU CAMEROUN, à savoir, toutefois qu’il se produit une manifestation de la population, les forces de l’ordre, Y COMPRIS L’ARMEE, sont aussitôt déployées sur le terrain, et se mettent à tirer, impunément, sur les manifestants. Pis encore, dans le cas de la dernière manifestation en date, à savoir celle du 25 au 29 février 2008, les forces de l’ordre ont même reçu une gratification, sous forme d’une hausse de salaire, pour l’œuvre macabre accomplie.
Le Collectif des Citoyens Camerounais contre l’utilisation d’Armes à feu par les forces de l’ordre lors des Manifestations, s’insurge contre cette pratique.
Au mois de décembre 1990, le président de la République a promulgué des lois abolissant la dictature et instaurant la démocratie au Cameroun. Les marches, les manifestations de rue, comme les pétitions et la distribution de tracts, sont, dans tous les pays du monde, des modes d’expression de la démocratie. D’où vient donc que les forces de l’ordre utilisent les armes à feu contre des manifestants au Cameroun ?
La justification des meurtres des forces de l’ordre est que les manifestants seraient les premiers à recourir à la violence. Plutôt que de manifester pacifiquement, ils procèderaient à la destruction des biens des particuliers comme de l’Etat.
En vérité, la casse dans les manifestations, est un phénomène universel qui se produit, fré-quemment, et qui ne saurait servir de justificatif à l’utilisation d’armes à feu par les forces de l’ordre. Celle-ci, dans le cas du Cameroun, semble plutôt être exploitée comme une aubaine pour procéder à des démonstrations de force sanglantes contre des revendications populaires. Pour tout dire, une occasion d’intimider la population, de la dissuader d’organiser quelle que autre manifestation. Le terme utilisé est : « force demeurera à la loi ». Traduit en langage audible pour la population, cela signifie : « manifestez et vous serez tués, au nom de la loi ».
En France, en 2005, lors des émeutes de banlieues, des centaines d’ automobiles ont été brûlées sans que, dans le même temps, la police ne tire sur UN SEUL manifestant. De même, nous venons d’assister à des manifestations de plus d’un mois aux Antilles françaises, sans que les forces de l’ordre ne tirent sur quiconque. Au Cameroun, en 5 jours, il y a eu 40 morts, (chiffre officiel) ce qui correspond à une moyenne de 8 morts par jour !!! C’EST INADMISSIBLE. La manifestation aurait duré un mois, comme en Guadeloupe, que l’on aurait abouti à 8 X 30 = 240 morts !!!
Etant donné ce qui précède, le Collectif des Citoyens Camerounais contre l’utilisation d’Armes à feu par les forces de l’ordre lors des Manifestations entend recourir à la prévention de l’usage d’armes à feu, et à la défense des victimes de celles-ci lors des manifestations.
L’activité de prévention
du Collectif des Citoyens Camerounais contre l’utilisation d’Armes à feu par les forces de l’ordre lors des Manifestations, consiste à :
1/- sensibiliser les forces de maintien de l’ordre sur le non recours aux armes à feu en cas de manifestation ;
2/- l’utilisation, plutôt, de camions à eau, de bombes lacrymogènes, de matraques, de gilets-pare
balles, de boucliers et de casques, ainsi qu’il est de règle à travers le monde entier ;
3/- l’interpellation des manifestants les plus excités et les plus violents ;
4/- l’interpellation, permanente, des autorités publiques sur leur responsabilité en cas de mort
d’homme au cours d’une manifestation.
L’activité de défense
du Collectif des Citoyens Camerounais contre l’utilisation d’Armes à feu par les forces de l’ordre lors des Manifestations, consiste à :
1/- identifier les morts par balles, ou toute autre méthode violente (au mois de février 2008, les forces de l’ordre avaient coincé, à Douala, sur le pont du Wouri, des manifestants, et s’étaient mis à les jeter dans le fleuve) ;
2/- porter plainte, sur le plan international, contre l’Etat camerounais, et les autorités responsables des tueries, (commissaires de police, commandants de brigades de gendarmeries, commandants de la Brigade d’Intervention Rapide, B.I.R., colonels de l’armée et de la gendarmerie, membres du gouvernement, etc) en cas de mort d’homme, et de refus de constitution d’une commission d’enquête, notamment à la Cour Pénale Internationale, la CPI, et dans les juridictions européennes à compétence universelle.
Nous nous insurgeons, vivement, contre les propos du président de la République rendant les victimes des émeutes responsables de leur propre mort, lorsqu’il déclare : « les apprentis sorciers qui dans l’ombre ont manipulé ces jeunes ne se sont pas préoccupés du risque qu’ils leur faisaient courir en les exposant à des affrontements avec les forces de l’ordre ». Nous, nous disons, les forces de l’ordre ne sont pas là pour tirer sur les jeunes.
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