mardi 1 juillet 2008

La limitation du mandat présidentiel en France ou quand les bouches se ferment au Cameroun

Tout récemment, les Français ont limité le nombre de mandats que peut effectuer un président de la République. Ni la Crtv, ni Cameroon Tribune, personne n’en a fait état…

Où sont passés les intellectuels intéressés, du Cameroun, qui encensaient le régime dans son projet insensé d’abolir la limitation des mandats présidentiels dans notre pays ? Ont-ils perdu, à la fois, langue et stylos ? Ils citaient, comme modèle, la France, où le nombre de mandats présidentiels n’était pas limité. Mais, voilà que cette France, justement, vient de décider tout le contraire. Pourquoi ne parlent-ils plus ? N’en sont-ils pas informés ?

DE FIEFFES MENTEURS : LES « INTELLECTUELS » CAMEROUNAIS

Pendant toute la campagne pour la levée de la limitation des mandats présidentiels, nous nous sommes retrouvés avec au moins trois types d’intellectuels : ceux qui ne savaient pas, donc une bande d’ignorants, malgré leurs agrégations es n’importe quoi et leurs cours qu’ils donnent à Soa (nous plaignons nos pauvres enfants qu’ils forment) ; ceux qui savaient, mais mentaient ; et, enfin, ceux qui savaient, mais étaient étouffés. Cette dernière catégorie ne nous intéresse que très peu ici.

Les intellectuels ignorants.

Il s’agit de cette bande d’individus qui, tels des perroquets, répétaient, inlassablement, que le président de la République a raison, bien mieux, il est « la chance du Cameroun » parce qu’il « a apporté la paix », que cette modification constitutionnelle lui permettra, enfin, d’avoir « les coudées franches pour mettre en œuvre sa politique des grandes ambitions ». Ils avaient répandu un grand nombre de propos sot comme ceux-là. Naturellement, ils se moquaient, éperdument, de savoir l’opinion que la population allait avoir d’eux, dès lors qu’ils espéraient être entendus par qui de droit, à savoir le président de la République.

Les intellectuels qui savaient mais mentaient.

Cette catégorie se rapprochait de la première, dans la mesure où seul le résultat comptait, à savoir que le message de leur engagement effréné aux côtés du régime agonisant du renouveau parvenait aux oreilles du président de la République. Alors, ils soudoyaient les journalistes de la Crtv pour obtenir des interview au journal de 13 heures, figuraient dans les débats soporifiques de la Crtv-télé, inondaient, par leur discours, les ondes des radios privées que son excellence le Mincom avait fini par fermer, achetaient des pages entières dans les journaux de la place pour se rassurer de mieux se faire voir, car la compétition des perroquets était âpre.

QUEL ETAIT L’OBJET DU MENSONGE OU DE L’IGNORANCE ?

La constitution française de 1958, actuellement en vigueur, est l’œuvre d’un dictateur, en la personne de Charles de Gaulle. Ce personnage, c’est connu, abominait la constitution de 1946, c’est-à-dire, celle d’avant, pour trois raisons fondamentales : 1/- le parlement y contrôlait beaucoup trop, à son goût, l’exécutif ; 2/- le président de la République n’était pas élu au suffrage universel, mais plutôt par le parlement ; 3/- la constitution de 1946 avait été élaborée par une assemblée constituante, donc, selon les mots de De Gaulle, par une « foutaise ». Reprenons ces trois points.

La toute puissance du Parlement.

Ce reproche de De Gaulle correspondait à son abomination du régime parlementaire. En bon militaire, il rêvait de mettre les Français au pas, comme dans un régiment. « A vos ordres ! », c’est le langage auquel il était habitué, et qu’il désirait entendre de ses compatriotes. En conséquence, le régime de sa préférence, était le régime présidentiel fort, quasi-dictatorial. En 1946, il avait voulu imposer cet esprit à la France. Les Français l’ont aussitôt prié d’aller se faire voir ailleurs. Il est donc entré dans une retraite de 12 ans, au cours de laquelle, il n’avait cessé de comploter pour le renversement du régime de la quatrième République, 1946-1958, c’est-à-dire celui issu de cette constitution qu’il abominait. Les événements d’Alger, à savoir les émeutes de la période de l’indépendance de ce département français, lui ont procuré l’occasion inespérée de prendre le pouvoir sans être élu, autrement dit, en se faisant rappeler de sa retraite politique simulée. Au mois de mai 1958, il était effectivement invité par René Coty, président de la République française, à former le gouvernement, c’est-à-dire à devenir Premier ministre (on appelait Président du Conseil). Naturellement, il a accepté, mais, non sans poser ses conditions, dont la principale était l’élaboration d’une nouvelle constitution. Or, qui dit élaboration d’une nouvelle constitution, dans un contexte tel que celui de la France en 1958 où l’autorité de l’Etat était à terre, dit, d’office, renversement du régime. Voilà donc comment Charles de Gaulle a organisé un coup d’Etat en France. Il n’a pas eu besoin de l’armée, il a eu besoin des émeutes d’Alger.

Pour élaborer sa constitution, cela va sans dire, Charles de Gaulle s’est bien gardé de faire élire une assemblée constituante, cette « foutaise ». A la place, il a plutôt créé un « Comité Consultatif Constitutionnel ». Ce fameux comité a rédigé une constitution qui a été présentée au peuple français, pour approbation, le 28 septembre 1958. Naturellement, compte tenu du climat tendu qui prévalait en France à l’époque, le peuple français a voté « OUI ». Il ne restait plus à René Coty qu’à se retirer du pouvoir, et au mois de décembre 1958, Charles de Gaulle était président de la République.

Fait très important à relever, c’est exactement de la même manière que ….Adolf Hitler est arrivé au pouvoir, au mois de janvier 1933. Il n’avait pas remporté les élections législatives. Il n’avait fait que conspirer pendant les dix années précédentes, menaçant de mettre à feu et à sang l’Allemagne si Paul von Hindenburg, le président du 2ème Reich ne le désignait pas Premier ministre. Une fois Adolf Hitler Chancelier, c’est-à-dire Premier ministre, on connaît la suite : 27 février 1933, incendie Reichstag, le Parlement allemand. C’était sa manière à lui d’anéantir le parlement.

Charles de Gaulle, pour sa part, lui a considérablement réduit les pouvoirs, au point où, la récente réforme de la constitution française, a eu pour finalité, entre autre, le rééquilibrage des pouvoirs entre l’exécutif et le législatif, au profit du législatif. Voilà ce que les intellectuels camerounais, soit ne savaient pas en ergotant sur la levée de la limitation du mandat présidentiel au Cameroun, soit savaient, mais, taisaient.

L’élection du président de la République par le parlement.

Ceci est la conséquence toute logique de tout régime parlementaire. Il était ainsi normal qu’en France, le président de la République ne fut pas élu au suffrage universel. Mais, cela comporte comme principale conséquence, que ce dernier ne pèse pas d’un grand poids sur les institutions. Ce que De Gaulle ne pouvait admettre. Il voulait être un quasi-roi. En 1962, il a, ainsi, procédé à la modification de cette clause, en faisant désormais élire le président de la République au suffrage universel, transformant définitivement de cette manière le régime politique français en régime présidentiel.

L’élaboration de la constitution par une assemblée constituante.

Toutes les constitutions avant de Gaulle, avaient été élaborées ainsi. La raison en est que c’est le mode d’élaboration démocratique d’une constitution. En 1945, au sortir de la guerre, la France a ainsi élu une première assemblée constituante dont la constitution qu’elle avait élaborée avait été rejetée par le peuple, au cours du référendum qui avait suivi. Cette première assemblée constituante a alors été, d’office, dissoute. Une seconde a été élue. C’est cette dernière qui a élaboré la constitution de 1946, que Charles de Gaulle détestait à mourir. Le Cameroun avait des députés à ces deux assemblées constituantes : Louis-Paul Aujoulat, pour le compte des Blancs du Cameroun, et Alexandre Douala Manga Bell, pour le compte des « indigènes », c’est-à-dire nous. Mais, voilà l’une des choses qui choquaient le plus de Gaulle, à savoir que des Nègres aient pu participer à la rédaction de la constitution française. Il considérait cela comme un affront, une souillure.

Nos intellectuels camerounais qui prenaient pour modèle la constitution française de 1958, savaient-ils tout ceci ?

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